Il y a quelques semaines une partie de l’équipe de Devenez Leader a eu le plaisir de se rendre au salon Epsilon  à Louvain La Neuve. Notre but principal était d’assister à la conférence de Cécile Dejoux, professeur au CNAM et à l’ESCP Business School. Conférencière sur le management, son point de vue nous intéressait particulièrement. Nous avons donc décidé, ce mois-ci, de vous le partager.

Que dit donc Cécile Dejoux ? Quels éclaircissements apporte-t-elle sur le management d’aujourd’hui ?

Un premier point concerne le niveau d’incertitude auquel les organisations et leurs dirigeants font face aujourd’hui. L’incertitude est ce qui est improbable. Et bien ce niveau d’incertitude est maximal : des éléments nouveaux comme la crise du Covid, la guerre en Ukraine, la hausse des prix de l’énergie, et d’autres retournements rapides et difficilement contrôlables font que nous nous situons au cran maximal de l’échelle d’incertitude. Ce qui nous demande de créer des réponses nouvelles et rapides.

L’incertitude n’a pas que des mauvais côtés. Il est nécessaire d’en voir les côtés positifs. C’est le moment où l’on est contraint d’apprendre, de changer nos modèles stratégiques ou mentaux, de changer de perspective. L’incertitude, c’est là où nous apprenons le mieux  et surtout, où l’on retient le mieux ce que l’on a appris.

L’incertitude est également un accélérateur de collaboration. Elle permet de donner la parole à ses collaborateurs afin d’écouter ce qu’ils ont à dire et capter dans leurs retours tous les signaux faibles propices à une meilleure compréhension de son environnement interne et externe.

Un second point énoncé lors de sa conférence concerne la notion de paradoxe. Cécile Dejoux nous rappelle qu’avant, dans un monde moins rapide et plus prévisible, le leader décidait de la marche à suivre. Son groupe suivait et la démarche était couronnée de succès. Aujourd’hui ce n’est plus le cas. Ou de plus en plus rarement. Le leader d’aujourd’hui doit manier des opposés, des injonctions paradoxales dans sa prise de décision face auxquelles il faut trancher. Les choses sont devenues ambigües. Le contexte est devenu une zone grise et non plus blanche ou noire. Le leader doit apprendre à manier les opposés. Face à cela, les valeurs à privilégier sont la frugalité (épargner les ressources – ne pas forcément chercher à investir plus de ressources) et l’innovation par le biais de réponses nouvelles. Et bien sûr créer les conditions de cette innovation en interne.

Le contexte actuel est caractérisé par une accélération des rythmes et des capacités des outils au service du business. Et nous ne pouvons nullement demander le même rythme aux humains. Sprinter toute la journée est impossible. Nous ne récolterons que de l’épuisement, de l’inefficacité et de la non-productivité. Place au slow management ! Prendre le temps et donner du temps. Comme par exemple,  accepter que ses collaborateurs n’aillent pas à toutes les réunions. Bref, reconsidérer la décélération comme outil de management. Et respecter la singularité de chacun de ses collaborateurs comme, pour donner un exemple, vis-à-vis du télétravail : certains sont « télérobustes », d’autres « téléfragiles ». « one size fits all » n’est plus à l’ordre du jour.

Face à tout cela, quelle posture managériale adopter ?

Il est devenu indispensable de manager à la pagaie : en prenant des tangentes, en acceptant incertitudes et paradoxes défiant la logique. En étant agile, opportuniste aussi. En étant astucieux et en s’insérant dans des communautés ou en les développant. Nous ne sommes plus dans le monde stable de l’expertise. Cela bouge et vite.

Notons aussi l’importance d’être un leader modélisateur : utiliser les data afin d’anticiper des scenarii et comprendre si ce que l’on fait est performant. Afin de s’adapter à son marché. Savoir utiliser les statistiques est important. Des outils comme My Data Model existent pour nous y aider.

Savoir travailler de manière hybride est clé : en synchrone et asynchrone. Pour le travail et la formation. Cela présente les avantages d’être moins cher, d’accommoder des groupes et d’inclure le monde entier. Les canaux de communication sont également à repenser : quel canal pour quel type de communication ? La revue des agendas également : toutes les réunions sont-elles nécessaires et utiles ? 

Mais cela ne suffit pas. Face au désengagement actuel, le management doit comprendre qu’il se situe aujourd’hui dans la logique du « Care ». Prendre soin de soi et des autres physiquement, mentalement et émotionnellement. Prendre soin de Soi et de son équipe. C’est une co-responsabilité qu’il est nécessaire de porter ensemble. Le « Care » signifie également réapprendre à gérer son agenda, reprendre la main sur son attention, continuer à prendre le temps d’apprendre. Car on nous vole sans cesse attention et mémoire. Il est temps d’apprendre à se recentrer. Et sur ce point, « less is more ».

Voilà en quelques concepts clés les grandes lignes de sa conférence . Cela nous conforte dans l’idée que le leadership est un rôle à Haute Responsabilité Humaine et que cela ne s’improvise pas et nécessite de s’adapter sans cesse. Pour mieux soutenir et réaliser les projets de son équipe et de son organisation.